\RCHEOLOGIEDl MIDI MEDIEVAL- TOME V- 1W

LA VAUNAGE DU IIP SIECLE

AU MILIEU DU XIIe SIECLE.

HABITAT ET OCCUPATION DES SOLS

Anne PARODI*, Claude RA YNA UD* et J.M. ROGER* *

Keywords

L'étude de la Vaunage (Gard) à la fin de l'Antiquité et dans le haut Moyen Age permet d'aborder les questions de l'habitat et de l'occupation du sol de manière diachronique. La problématique est centrée sur l'habitat rural, envisagé dans la longue durée, depuis le IIIe jusqu'au XIIe siècle. A partir d'un état de l'occupation gallo-romaine de la Vaunage, nous tenterons de dégager les grands traits de l'évolution de l'habitat et du monde rural autour de deux questions principales, le passage de l'Antiquité tardive au premier Moyen Age (IVe- VIIe s.) d'une part, et les mutations du haut Moyen Age (IXe- XIe s.) d'autre part. Parallèlement à cette approche chronologique, notre recherche s'intéresse à la morphologie de l'habitat, qu'il soit groupé ou dispersé, à sa répartition sur les hauteurs ou en plaine, à la nature des pôles de développement liés à des facteurs naturels ou sociaux.

La place du grand domaine gallo-romain au sein de l'occupation du sol, son devenir dans le haut Moyen Age, les transformations de l'habitat groupé hérité de la protohistoire, l'apparition et l'organisation du village médiéval sont les thèmes majeurs qui structurent notre enquête.

L'utilisation conjointe des données matérielles fournies par l'archéologie et des données textuelles livre une riche documentation. Le cartulaire du Chapitre de Notre Dame de Nîmes rassemble des chartes rédigées entre 876 et 1156, apportant de nombreuses informations sur le territoire des villae et ses différentes composantes. Par leur nature, ces actes n'autorisent pas toujours des localisations précises et ne favorisent pas l'étude en longue durée car ils sont absents avant le IXe siècle. Les données archéologiques tendent à combler ces lacunes. Les prospections et les fouilles, par leur rapport étroit avec le terrain, renseignent précisément sur la taille des sites, sur la répartition des vestiges d'habitat et couvrent par ailleurs un champ chronologique très

large. La complémentarité des deux types de sources favorise donc l'établissement d'un tableau précis et nuancé d'un espace rural en mutation.

Notre étude de synthèse bénéficie d'autre part des acquis d'une intense recherche archéologique sur les antécédents de la période tardo-romaine et médiévale. Un avantage supplémentaire est constitué par la situation de la Vaunage, région privilégiée des possessions des chanoines de Nîmes. Les textes du cartulaire offrent donc une image homogène et fiable de l'occupation du sol.

Par son ampleur chronologique, cette enquête veut dépasser les découpages traditionnels qui ont tendance à négliger les problèmes de transition pour privilégier les contrastes et les ruptures. Ainsi apparaissent mieux les grandes transformations de la société rurale. L'étonnante pérennité du réseau de l'habitat depuis le début de l'époque gallo-romaine constitue le résultat essentiel de notre étude. Le remodelage du paysage après l'an mil est aussi très sensible, sans pour autant remettre en cause la répartition du peuplement et la prédominance de l'habitat groupé. Parallèlement, la précocité d'un essor démographique du proto Moyen Age paraît bien établie.

1. Le cadre géographique

La Vaunage occupe une position intermédiaire entre la plaine littorale languedocienne et les Cévennes, premiers contreforts du Massif Central. Grâce à cette situation, cette région est, dès la protohistoire, en contact avec des voies de communication importantes : la voie Domitienne passe au sud et traverse le Vidourle à Am- brussum ; la voie de Nîmes à Lodève traverse probablement la Vaunage pour franchir le Vidourle à Sommières (fig. 1). Cet emplacement privilégié est renforcé par la proximité de Nîmes, quinze kilomètres à l'est.